Page:Las Cases - Mémorial de Sainte-Hélène, 1842, Tome II.djvu/76

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fermé, de manière à tenir tête à toute son armée réunie ; s’il veut gagner Ratisbonne, il doit le trouver aussi en défense. Dans ces deux derniers cas, Napoléon tombait sur les derrières de l’ennemi, et le poussait, soit sur le Danube, soit sur les Alpes. Ainsi la manœuvre contre l’ennemi, qui finit par se diriger sur Ratisbonne, va être aussi désastreuse pour lui que brillante pour nous ; car, avec sa droite, avancée entre le Danube et l’Iser, Napoléon va refouler dans le cul-de-sac, entre ces deux rivières, l’archiduc qui s’y est imprudemment enfoncé. Il ne s’agissait de rien moins que de la destruction totale de l’armée ennemie, si les ponts de Ratisbonne et de Landshut ne s’étaient pas trouvés ouverts.

« Napoléon annonce à Masséna que, pour cette grande et décisive manœuvre, il va refuser sa gauche, avancer sa droite ; et qu’entre le 18, le 19 et le 20, toutes les affaires de l’Allemagne seront décidées. »

Ici se trouve cette belle manœuvre qu’a voulu probablement mentionner l’Empereur, c’est-à-dire les dispositions préparatoires de la bataille, et elles sont en effet admirables. L’auteur décrit le placement et la marche de tous nos corps, ceux de l’ennemi, les engagements partiels, le résultat général, les fautes de l’archiduc, les nôtres même, dans les exécutions subalternes du moins ; car, pour la conception du chef, il nous la montre complète et devant amener infailliblement l’annihilation entière de toutes les forces ennemies. Je saute à pieds joints sur tous ces détails très curieux : ils seraient bien accueillis sans doute par les militaires ; mais ils pourraient paraître longs à tous les autres, et ils m’écarteraient de mon but outre mesure. Je passe tout de suite aux grands résultats exprimés dans la proclamation suivante de Napoléon, et puis aux réflexions de l’auteur :

« Soldats ! dit l’Empereur, vous avez justifié mon attente, vous avez suppléé au nombre par votre bravoure ! En peu de jours vous avez triomphé dans les trois batailles de Thann, d’Abensberg et d’Eckmülh, et dans les combats de Peissing, de Landshut et de Ratisbonne. Cent pièces de canon, quarante drapeaux, cinquante mille prisonniers, trois équipages, trois mille voitures attelées portant les bagages, toutes les caisses des régiments : voilà le résultat de la rapidité de vos marches et de votre courage.

« Naguère l’ennemi se promettait de porter la guerre au sein de notre patrie ; aujourd’hui, défait, épouvanté, il fuit en désordre. Déjà l’avant-garde a passé l’Inn, avant un mois nous serons à Vienne. »

« Cette proclamation, envoyée de tous côtés, annonça aux amis comme aux ennemis de la France les victoires et les projets de l’Empereur, etc.