Page:Las Cases - Mémorial de Sainte-Hélène, 1842, Tome II.djvu/911

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nières douleurs, tout inspirait à l’âme une de ces émotions dont le souvenir ne se perd jamais.

« L’absoute terminée, nous repartîmes aussitôt. En passant sous le pont, le bateau impérial fut jonché d’immortelles, de lauriers et de fleurs tressées : les soldats de l’Empire envoyaient à leur Empereur une dernière couronne.

« Depuis longtemps déjà nous avions quitté la vieille cité, que le canon tonnait encore. A Elbeuf, même enthousiasme. Là, de nombreux ouvriers, richesse de nos manufactures ; les uns faisant de leurs voix retentir le rivage ; les autres, chargés d’un ou de deux enfants, montrant du doigt le cercueil du héros, dont ils racontaient sans doute la vie à cette jeune génération, étonnée d’un semblable spectacle. Prés du Pont-de-l’Arche, un épisode touchant s’offrit aux regards de la flottille.

« La famille d’un pécheur s’était avancée jusque dans l’eau pour voir le cortége et le saluer de ses acclamations. Le père, ancien conscrit de l’Empire, tenait sur ses épaules deux jeunes garçons ; la mère et une jeune fille, l’ainée de la famille, présentaient au passage un drapeau tricolore, et l’inclinaient vers le bateau qui portait le cercueil de Napoléon.

« Ce fut au milieu de pareils transports, poursuit l’abbé Coquereau,