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PIERRE LASSERRE

libres », — libres-penseurs même ! C’est, au contraire, un fait singulier que tout ce qu’il y a, ou tout ce qu’il y avait sur terre de liberté, de finesse, de hardiesse, de légèreté, de sûreté magistrale, que ce soit dans la pensée, ou dans la façon de gouverner, dans la manière de dire ou de persuader, dans les arts comme dans les mœurs, ne s’est développé que grâce « à la tyrannie de ces lois arbitraires » ; et sérieusement, il est très probable que c’est précisément cela qui est « nature » et « naturel » — et nullement ce laisser-aller… Le principal « au ciel et sur la terre », semble-t-il, pour le dire encore une fois, c’est d’obéir longtemps et dans une même direction : il en résulte toujours à la longue quelque chose pour quoi il vaut la peine de vivre sur terre, par exemple la vertu, l’art, la musique, la raison, l’esprit, — quelque chose qui transfigure, quelque chose de raffiné, de fou et de divin.

(Par delà le Bien et le Mal, trad. L. Weiskopf et G. Art, page 104.)