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Page:Lasserre - Les Idées de Nietzsche sur la musique, 1907.djvu/116

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LES IDÉES DE NIETZSCHE SUR LA MUSIQUE

Dans l’esthétique ultra-tristanienne qu’évoque Nietzsche, et dont on a vu depuis Tristan des exemples de plus en plus prononcés, le dissonant forme le principe, la fin, le support (si support pouvait se dire d’un élément qui se définit par instabilité et fluidité), le milieu général ; la consonnance n’apparaît que comme rencontre heureuse, bonne fortune, agrément fugitif ; elle n’en est que plus enchanteresse, mais elle s’est fait payer un peu cher, tel un timide rai de soleil, un jour d’orage… ou de pluie. Sans appliquer certes cette observation à Tristan, il faut dire, en général, à l’avantage de cette musique à base dissonante, c’est-à-dire sans base, que le mâle et clair langage de l’harmonie consonnante ne convient qu’à des idées grandes et pleines ; il souligne de sa grandeur propre la misère des autres. Au lieu que le langage dissonant a une vertu merveilleuse pour amplifier et faire chatoyer à l’infini des avortons, des larves et des filaments d’idées.

Faut-il prévenir cette méprise que les présentes