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LES IDÉES DE NIETZSCHE SUR LA MUSIQUE

La réunion de tous ces facteurs semble impossible : tel mucisien traduira isolément des dispositions émotionnelles excitées par le drame, qui ne saura que faire de la plus grande partie du drame ; de là sans doute le récitatif et la rhétorique. Le poète sera impuissant à tirer d’affaire le musicien et par là hors d’état de se tirer d’affaire lui-même : il ne désire qu’une chose, faire autant de poésie qu’on en peut chanter. Mais c’est là ce dont il a une connaissance théorique, nul sentiment interne. Voici à son tour l’acteur, qui est aussi chanteur et doit à ce titre se livrer à une foule d’actions, ce qui n’est pas dramatique, ouvrir la bouche toute grande, etc. ; il lui faut des manières conventionnelles. Maintenant tout changerait, s’il arrivait que l’acteur fût en même temps musicien et poète[1].


Cet acteur, en même temps musicien et poète, ou, plus précisément, ce génie d’acteur qui a à son service les moyens du musicien et du poète, Nietzsche ne l’imaginait pas. Il croyait l’avoir sous les yeux en la personne de Richard Wagner. Nous le verrons bientôt expliquer comment, grâce à cet assemblage de qualités et à la prédominance impérieuse de celle à laquelle semble con-

  1. T. X, p. 438.