vresse[1] » et par là d’endormir « la mauvaise
conscience », Nietzsche appelle ici Wagner « le
nouveau porteur de lumière[2] ». Mais cette
- ↑ R. W. in B., p. 535.
- ↑ Ibid., p. 536. « Ils haïssent la lumière qui les éclaire sur
eux-mêmes, ils se dérobent au nouveau porteur de lumière ; mais
il s’attache à leur pas, contraint par l’amour, dont il est né et il
veut les contraindre. « Vous devez traverser mes mystères,
leur crie-t-il ; vous y trouverez les purifications et les commotions
dont vous avez besoin. Osez-le pour votre salut et laissez
une bonne fois ce fragment de la nature et de la vie éclairé
d’un jour trouble ; que vous paraissez seul connaître ; je vous
conduis dans un royaume qui est également réel : vous-mêmes
direz en revenant de ma caverne à votre jour quelle vie est la
plus réelle et où est, à proprement parler, le jour, où la caverne.
La nature est, à mesure qu’on pénètre en son fond, plus riche,
plus puissante, plus radieuse, plus terrible ; vous ne la connaissez
pas, vivant comme vous êtes habitués à vivre ; apprenez
à redevenir nature vous-mêmes et laissez-vous ensuite transformer
avec elle et en elle par mon charme d’amour et de feu. »
C’est la voix de l’art de Wagner qui parle ainsi aux hommes.
Et qu’à nous, enfants d’une époque lamentable, il ait été donné
d’entendre les premiers sa voix, cela montre combien cette époque
précisément est digne de pitié. »
Ce passage donnera le ton de tous ceux où l’art wagnérien est proposé comme « régénérateur » de l’âme moderne. Mais répétons une remarque dont l’occasion s’est plusieurs fois produite. Quand Nietzsche en viendra à professer la haine de l’art de Wagner, il n’aura pas besoin d’autres caractéristiques que celle qu’il emploie ici. Que nous « redevenions nature », c’est-à-dire que l’âme cesse de se posséder elle-même sous les impressions de la musique de Wagner, c’est justement ce dont il se plaindra. Et il jugera notre époque « digne de pitié » pour avoir trouvé son expression dans cet art. Il n’aura qu’à redire les mêmes choses sèchement, sans lyrisme, avec le mot propre, au demeurant avec ou sans équité.