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LES IDÉES DE NIETZSCHE SUR LA MUSIQUE


tique qui, en émouvant la sensibilité du compositeur, fait naître dans son esprit une inspiration musicale modelée, en quelque sorte, sur le sens de ce texte. Le texte apporte à l’inspiration l’occasion de se déployer et comme un soutien pour son déploiement. L’inspiration musicale préexiste, pure expression de l’âme du compositeur de génie, et s’enroule sur des paroles propices. Rapport plus facile à imaginer, on en convient, qu’à définir par des mots, mais qu’une expérience familière à tout amateur un peu informé de musique peut éclaircir. N’est-il point vrai que quand nous lisons les gracieux poèmes de Wilhelm Müller sur lesquels Schubert a écrit le cycle des Müllerlieder ou les beaux poèmes de Chamisso et de Heine qui ont fourni à Schumann le texte de ses deux cycles de lieds les plus célèbres, n’est-il point vrai que les mots eux-mêmes chantent obstinément dans notre mémoire les mélodies immortelles et n’existent pour ainsi dire plus, indépendamment de la musique ? Au contraire, le souvenir musical garde la plus