Page:Latocnaye - Promenade d un Francais dans la Grande Bretagne - 2e edition, Fauche, 1801.djvu/40

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l’espoir frivole d’être couverts de gloire, cent ans après leur mort.

Au surplus, je me joins aux Anglais, dans le juste tribut d’admiration qu’ils rendent à Shakespear : j’ai lu plusieurs fois tous ses ouvrages : dans le commencement, l’habitude de la régularité de nos grands auteurs, ne me permettait pas de voir avec patience, dans la même pièce, l’héroïne naître en Sicile, être transportée à la nourrice et faire naufrage sur les côtes de Bohême, à deux cents lieues de la mer, y être élevée par un berger, y épouser le fils du roi et retourner en Sicile ; d’entendre dans la même tragédie, les plaisanteries grossières d’un savetier et le noble discours de Marc-Antoine au peuple Romain ; peu-à-peu, l’on se fait à tout cela et l’on oublie les fautes, pour ne plus voir que les beautés : on ne regarde plus ces pièces comme des comédies, ou des tragédies, suivant le sens que nous y donnons, mais comme une espèce d’histoire mise en dialogue, et l’on est bien aise, de voir l’effet que produit le même événement sur les différentes classes d’hommes, depuis le monarque, jusqu’au dernier de ses sujets. Ses pièces se ressentent aussi beaucoup du temps où il écrivait : on se rappelle, que les grands dans toutes les nations de l’Europe, avaient toujours près d’eux un homme privilégié, qu’on appelait le Fou, cet homme était vêtu d’une manière