Page:Latocnaye - Promenade d un francais en suede et en norvege, 1e part, 1801.djvu/91

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besogne tout seul, sans être obligé d’avoir recours au musicien.

La salle de l’opéra est fort belle et très-bien décorée, et c’est dans cette salle où Gustave III fut si souvent applaudi, où le public avait besoin de son exemple pour apprécier les bons morceaux et où à présent il n’applaudit rien du tout, que Gustave III fut assassiné. Il m’a toujours été difficile, dans les ballets les plus brillans, d’oublier que cette même coulisse, par où la gentille Mde de Ligny entrait ou sortait en cabriolant avec tant de grâce, était la même, où le roi tomba.... Cependant le public[1] ne paraît pas y penser beaucoup, et il voit et entend tout avec la froideur et l’étiquette la plus compassée. Cette froideur est souvent si marquée, que dans quelques occasions, j’en ai presque été scandalisé : par exemple comment les Suédois peuvent-ils voir leur jeune roi et leur jolie reine venir prendre part aux plaisirs du public, sans en témoigner la moindre sensation : pas le moindre applaudissement : le silence le plus glacé règne. Ils saluent, le public est muet. (il) Quelque temps après l’assassinat du roi de Suède, le peuple qui se voyait avec rage privé d’un protecteur (dont la Suède commence enfin à sentir le prix) voulait détruire la salle, mais enfin le temps comme dans toutes choses, a fait son effet.

  1. Quelque temps après l’assassinat du roi de Suède, le peuple qui se voyait avec rage privé d’un protecteur (dont la Suède commence enfin à sentir le prix) voulait détruire la salle, mais enfin le temps comme dans toutes choses, a fait son effet.