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— Tous les jours, répondit Paul, ne recevons-nous pas des objets précieux des pays étrangers ? La religion chrétienne est la seule véritable ; devons-nous donc la rejeter par cela qu’elle vient d’un autre pays ? Mais plutôt tout homme n’est-il point tenu de la pratiquer ?

— Tu loues exclusivement la religion des étrangers ; prétends-tu donc que le roi fait mal de la prohiber ?

— À une pareille question, je ne puis pas répondre. Je le vois, il ne me reste qu’à mourir. »


Le Père Chastan, martyrisé en Corée (1839).
C’était, en effet, par perfidie que le juge avait présenté la question sous cette forme, sachant bien que le respect outré pour la personne du roi empêcherait Paul de répondre, ou qu’il se ferait condamner en insinuant le moindre blâme. Le courageux chrétien se mit alors à développer une apologie de la religion qu’il avait préparée avec ses amis. Le juge connut la justesse de sa cause, mais il coupa court aux arguments de Paul en lui disant :

« Toutes tes paroles seraient-elles justes, que tu as tort néanmoins d’enseigner au peuple ce que le roi a défendu. »

D’atroces supplices vinrent donner du poids à cette conclusion.

Six interrogatoires se succédèrent, dans lesquels on broya les membres de Paul à coups de bâton ; mais ce fut sans aucun résultat. Il resta d’une inébranlable fidélité à ceux à qui il avait voué sa vie, et il ne révéla rien au sujet de ses pères spirituels.

Lorsque Augustin Niou parut à son tour dans le prétoire, il fut sollicité par tous ses amis païens et même par le juge, qui l’estimait beaucoup, de se disculper par quelque signe d’apostasie. À ces moyens insinuants demeurés inutiles, une atroce torture succéda à cinq reprises différentes, mais sans faire aucune impression sur le confesseur. Et cependant malgré sa foi ardente,