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« Le lin n’est pas employé. Je l’ai souvent aperçu parmi les graminées des montagnes ; mais le Coréen le confond avec les plantes sans valeur, propres seulement à être jetées au feu. Avec le chanvre, on ne fait qu’une toile à trame claire, propre aux personnes en deuil, et qui d’ailleurs ne sert que pour les habits d’été. L’espèce d’ortie appelée urtica nivea est cultivée avec succès dans les provinces méridionales ; mais, faute de savoir filer et tisser, on n’en retire que des toiles à mailles inégales et très espacées qui, non plus, ne sont employées qu’en été.

« Sur toutes ses montagnes, la Corée pourrait élever des troupeaux immenses de moutons ; mais le gouvernement défend aux particuliers d’en nourrir. Dans certaines préfectures, les mandarins en conservent quelques-uns, uniquement pour offrir leur chair dans les sacrifices à Confucius. Aussi les Coréens n’ont-ils jamais essayé de tisser la laine ; à peine si quelques draps étrangers, la plupart de fabrique russe, parviennent à grands frais jusqu’à Séoul. La soie indigène est très grossière et en petite quantité. Cependant, en voyant le mûrier croître spontanément dans les montagnes et les vers à soie réussir malgré le peu de soin qu’on en prend, je suis convaincu que, sous l’impulsion d’un gouvernement intelligent, cette branche d’industrie pourrait acquérir de grandes proportions.

« Les toiles européennes de coton, importées par les Chinois, commencent à se vendre en Corée, mais leur prix très élevé et leur peu de solidité en restreignent forcément l’usage. »

De son côté, M. Féron écrivait en 1858 :

« J’habite la plus belle maison du village : c’est celle du catéchiste, un richard ; on estime qu’elle vaut bien vingt francs. Ne riez pas, il y en a de quinze sous. Ma chambre, de grandeur suffisante, vu l’ameublement, a pour porte une feuille de papier, pour fenêtre une feuille de papier ; deux autres feuilles de papier forment une grande porte à deux battants, qui communique avec la chambre voisine. Là demeure mon serviteur, et les deux chambres réunies forment l’église de la paroisse ; plus tard peut-être y ajoutera-t-on un clocher. Pour le moment il pleut chez moi comme dehors, et deux grands chaudrons ne suffisent pas à recevoir une