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tant d’autres pour que tu puisses t’éclairer toi-même, et nous instruire ensuite. Lorsque tu seras arrivé dans la grande ville, cours, je t’en prie, au temple des Européens ; ils possèdent, eux, la vérité. Interroge ces grands docteurs de l’Occident, approfondis toutes les questions, instruis-toi dans tous les détails de leur doctrine, et rapporte-nous aussi tous les livres nécessaires. Encore une fois, songes-y bien : la vie et la mort, la grande affaire de notre éternité, est entre tes mains. »

En quittant son ami, le zélé jeune homme ajouta encore :

« Va, mon cher, et dans cette circonstance, je t’en prie, n’agis pas à la légère. »

Cette dernière recommandation, faite sans doute d’un ton amical, dénotait chez Piek-i l’ardeur de ses désirs, mais aussi une certaine dose de méfiance que lui inspirait, assez légitimement, l’enthousiasme sincère, mais un peu à la surface, de son ami, que ne distinguait pas, du reste, une volonté ferme et persévérante.

De Séoul, capitale de la Corée, à Pékin, on compte trois cents lieues. Tous les ans, une ambassade solennelle, composée de grands personnages coréens, entreprend ce long voyage, pour transmettre les présents et les souhaits du roi de Corée à son suzerain. Autrefois, le tribut annuel payé par la Corée à la Chine était très considérable et très humiliant. Peu à peu elle a su s’en affranchir, en sorte qu’aujourd’hui le tribut annuel se réduit à un échange officiel de présents entre les deux souverains.

L’ambassade coréenne rapporte encore de Pékin le calendrier chinois, obligatoire pour tous les sujets et tributaires de l’Empire, sous peine de mort. Outre les nobles personnages qui font partie de ces ambassades, une suite très nombreuse d’interprètes et de domestiques l’accompagne, et même il y a toujours un certain nombre de marchands assez adroits pour acheter la permission de s’y adjoindre sous un prétexte ou sous un autre, mais, en réalité, pour faire un commerce très lucratif. Chacun est muni d’un passeport très détaillé, qu’il doit présenter à la frontière et sans lequel il n’est permis à personne de la franchir.

Aux approches de l’an 1784, Seng-hou-i se mit donc en