Page:Launay, Dallet - La Corée et les missionnaires, 1901.pdf/247

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déployant un appareil formidable, traduisit à sa barre les trois Européens et leur dit :

« Qui vous a logés ? D’où vient l’argent que vous avez ? Qui vous a envoyés ? Qui vous a appelés ? »

Ils répondirent :

« C’est Paul Tieng qui nous a logés. L’argent à notre usage, nous l’avons apporté avec nous. Nous avons été envoyés par le souverain pontife, chef de l’Église, et les Coréens nous ayant appelés pour secourir leurs âmes, nous sommes venus ici. »

Ces réponses leur attirèrent une rude bastonnade, qui fut renouvelée trois jours de suite.

Ils furent ensuite invités à quitter la Corée :

« Retournez maintenant dans votre patrie, leur dit le juge.

— Nous ne voulons pas, répondirent-ils, nous sommes venus pour le salut des âmes des Coréens, et nous mourrons ici sans regret. »

Reconduits à leur cachot, ils y furent pendant quelque temps gardés à vue jour et nuit ; transférés au Keum-pou, prison des dignitaires, ils subirent de nouveaux interrogatoires devant les principaux ministres ; ils furent condamnés à mort, et leur exécution fut fixée au 24 septembre.

Le jour venu, on les conduisit au supplice, en dehors de Séoul, en un lieu nommé Sai-nam-to, non loin du fleuve Han-Kang qui traverse la capitale.

À l’endroit fixé, on avait planté un pieu au sommet duquel flottait un étendard, portant la sentence de mort.

À peine arrivés, les condamnés sont dépouillés de leurs vêtements ; les soldats leur attachent les mains devant la poitrine, leur passent sous les bras de longs bâtons, leur enfoncent deux flèches de haut en bas à travers les oreilles, et leur jetant de l’eau au visage, les saupoudrent d’une poignée de chaux ; six hommes saisissent ensuite des bâtons, font faire trois fois aux martyrs le tour de la place, pour les livrer aux dérisions et aux grossières moqueries de la foule. Enfin on les fait mettre à genoux, et une dizaine de soldats courent autour d’eux le sabre au poing, simulant un combat, et leur déchargent en passant un coup de sabre.