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Je passais pour étranger, et on montait sur les arbres et sur les maisons pour me voir.

« Arrivés à Séoul, nous fûmes jetés dans la prison des voleurs. Les gens du prétoire, entendant mon langage, disaient que certainement j’étais Coréen. Le jour suivant, je comparus devant les juges. Ils me demandèrent qui j’étais.

« — Je suis Coréen, leur répondis-je ; j’ai été élevé en Chine. »

« On fit venir des interprètes de langue chinoise, pour s’entretenir avec moi.

« Pendant la persécution de 1839, le traître Je-saing-i avait déclaré que trois jeunes Coréens avaient été envoyés à Macao pour y étudier la langue des Européens. Je ne pouvais rester longtemps inconnu, et d’ailleurs un des chrétiens pris avec moi leur avait dit qui j’étais. Je déclarai donc au juge que j’étais. André Kim, l’un de ces trois jeunes gens, et je leur racontai tout ce que j’avais eu à souffrir pour rentrer dans ma patrie. À ce récit, les juges et les spectateurs s’écrièrent ;

« — Pauvre jeune homme ! dans quels terribles travaux il est depuis son enfance ! »

Sa grandeur d’âme et son intelligence séduisirent les ministres eux-mêmes, qui prièrent le roi de lui conserver la vie.

« Il a commis, lui dirent-ils, un crime digne de mort en sortant du royaume et en communiquant avec les étrangers, mais il l’a expié en rentrant dans son pays. »

Ils présentèrent ensuite la copie d’une mappemonde traduite par le prisonnier. Le roi, satisfait de ce travail, était sur le point d’accorder la grâce demandée, lorsqu’il reçut une lettre de l’amiral français Cécille, qui, des Liou-Kiou, venait d’arriver sur les côtes de la Corée.

Cette lettre était écrite en chinois, et en voici la traduction :

« Par l’ordre du ministre de la marine de France, le contre-amiral Cécille, commandant l’escadre française en Chine, est venu pour s’informer d’un attentat odieux qui a eu lieu le 14 de la huitième lune de l’année kei-hai (21 septembre 1839).

« Trois Français, Imbert, Chastan et Maubant, honorés dans