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victimes. À peine rendu à la légation russe, le roi destituait le ministère et lançait un mandat d’arrêt contre les principaux titulaires ; les décrets de la première heure sont entachés d’une violence regrettable, et qui n’eut que trop bien son effet. Deux des ministres, arrêtés dans la journée, furent massacrés sur-le-champ, et leurs cadavres livrés aux outrages de la populace ; un troisième fut tué quelques jours plus tard en se rendant en province ; les autres réussirent à s’échapper et probablement à se réfugier à l’étranger.

Avec le ministère, le Japon voyait du même coup tomber toute son influence, passée d’emblée aux mains de la Russie. Nombre de Japonais, répandus un peu partout dans la province pour leur commerce, étaient massacrés sans pitié par les populations : terrible retour des justices humaines, les innocents payaient pour les coupables.

Tous les décrets rendus précédemment par le roi sous la pression du ministère tombé furent rapportés ; la liberté est laissée à chacun de s’habiller à sa guise et de porter les cheveux longs ou courts ; une amnistie générale est accordée aux condamnés politiques, les troupes envoyées contre les Soldats de ta justice sont rappelées ; aux populations soulevées on envoie des émissaires royaux chargés de les ramener au calme et à l’ordre ; on promet toutes les satisfactions désirables.

Malheureusement la rébellion est plus facile à déchaîner qu’à apaiser, et les Soldats de la justice, habilités à tenir campagne, ne voulurent rien entendre aux messages de pacification. Sous prétexte que le roi était l’hôte et peut-être le vassal des étrangers, que justice n’avait pas été faite du meurtre de la reine, ils continuèrent à soulever le pays. Il fallut en venir aux moyens de rigueur et de nouveau envoyer des troupes contre eux.

Enfin, peu à peu, les choses se calmèrent, le roi retourna dans son palais, et la Russie se désintéressa, — pour un moment du moins, — de la Corée, la laissant sous le protectorat japonais, où elle est encore actuellement.

Comme toute la population paisible, les chrétiens ont souffert de ces révolutions successives. Un village de cinquante maisons