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fut, à leur occasion, partie incendié, partie pillé par les païens d’un canton voisin. Un autre village perdit tous ses bœufs et ses instruments de labour avec son mobilier.

Huit chrétiens, abominablement calomniés par leurs persécuteurs, sont depuis trois mois en prison et même condamnés aux travaux forcés, malgré leur innocence évidente.

Ce ne fut cependant pas général, et il semble, au contraire, que l’œuvre d’évangélisation a profité du désarroi dans lequel était le pays. Beaucoup de païens honnêtes sont allés vers les missionnaires avec l’arrière-pensée, sans doute, de trouver près d’eux quelque appui.

Par la grâce de Dieu, ils y ont d’abord trouvé le don de la foi, qui a bien vite corrigé ce que les dispositions premières avaient de défectueux. L’augmentation du nombre des baptêmes d’adultes est en effet exceptionnelle, puisque le chiffre en 1896 s’est élevé à deux mille sept cent vingt-quatre, soit près d’un millier de plus que d’habitude ; en 1897 et en 1898, la progression a continué, et sept mille quatre cent soixante-douze Coréens ont été régénérés dans les eaux saintes.

Le 22 février 1898 mourut le père de l’empereur, plus connu sous le titre de régent. Pendant les dix années qu’il fut au pouvoir, il se montra le plus féroce persécuteur que la Corée ait jamais vu. Il fut l’auteur de la persécution de 1866, qui fit tomber la tête de deux évêques, de sept missionnaires et de milliers de chrétiens. Rentré, contre son gré, dans la vie privée depuis plus de vingt ans, les déboires, la disgrâce et l’adversité l’avaient ramené à des sentiments plus humains. Peut-être voyait-il dans ses épreuves le châtiment de Dieu. Toujours est-il qu’il a plusieurs fois manifesté son regret de ses violences contre la religion catholique : il avouait s’être trompé. Ce regret n’a point été, hélas ! jusqu’au repentir efficace de la conversion : il est mort païen.

Sa femme, la princesse mère, qui l’avait précédé d’un mois dans la tombe, mourut dans la foi catholique. Chrétienne, elle l’était par le cœur depuis de longues années. Dès l’époque sinistre où le régent s’acheminait à l’extermination du nom chrétien,