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est administré par un mandarin d’un rang plus ou moins élevé.

Si de l’organisation civile de la Corée on passe à son organisation militaire, ce qui frappe d’abord, c’est le chiffre énorme de l’armée. Les statistiques officielles comptent plus de un million deux cent mille hommes portés sur les rôles. Cela vient de ce que tout individu valide, non noble, est soldat ; la loi ne reconnaît que très peu d’exceptions. Mais l’immense majorité de ces prétendus soldats n’ont jamais touché un fusil. Leurs noms sont inscrits sur les registres publics, et ils ont à payer annuellement une cote personnelle. Encore ces registres ne méritent-ils aucune confiance. Très souvent ils sont remplis de noms fictifs ; on y voit figurer des membres de familles éteintes depuis une ou deux générations, et beaucoup de ceux qui devraient être inscrits échappent à cette obligation en donnant quelque présent aux employés subalternes chargés de la révision des listes.

Les impôts ordinaires sur les propriétés, sur certaines professions et certains genres de commerce ne sont pas excessifs, mais ces impôts légaux ne représentent en réalité qu’une faible partie des sommes qu’arrache au peuple la rapacité des mandarins et des employés de tout grade. D’ailleurs, les registres de dénombrement, d’après lesquels l’impôt est perçu, ne méritent aucune confiance. Un fait notoire, dont les missionnaires ont été plusieurs fois témoins, c’est que les employés des mandarins, lorsqu’ils viennent dans les villages pour dresser les listes officielles, ont l’impudence de fixer publiquement la somme que devra leur payer quiconque ne veut pas être inscrit. Ordinairement c’est une affaire de cent ou cent cinquante sapèques (deux ou trois francs). S’il s’agit de l’inscription sur les rôles de l’armée, il en coûte un peu plus pour y échapper ; mais avec de l’argent on en vient également à bout.

Les provisions des magasins publics n’existent que sur les livres de compte. Dans le voisinage immédiat de la capitale, les arsenaux sont un peu fournis. Un fort, pris par les Américains lors de leur expédition (juin 1871), renfermait une cinquantaine de canons de fabrique chinoise, se chargeant par la culasse. Il