Page:Laurenceau - Le Petit neveu de l'Arretin, ouvrage posthume trouvé dans le portefeuille de son grand oncle, BnF Enfer-373, 1800.djvu/25

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Près des autels sacrés la dévote Phénice
D’eau bénite elle-même asperge la génisse ;
Dans le flanc des troupeaux, égorgés à ses yeux,
Son amour inquiet interroge les dieux,
La cruelle se plaît à ses sanglons spectacles,
Et de vils intestins sont ses plus saints oracles.

Ô prêtres ignorans, de quoi servent vos vœux !
Que servent ces autels ! l’incendie amoureux
Vit au fond du vagin, le consume, le ronge,
Et le vit, pour l’éteindre, est la plus sûre éponge.

Didon bande, et brûlant de la fièvre d’amour,
Arpente en ses accès la ville et le faubourg.
Telle par un chasseur une biche blessée,
Fuit et traîne avec soi le trait qui l’a percée ;
Envain dans ses tourmens elle bat les forêts,
Et les monts de Dictée, et ses vastes marais ;
A son jarret sanglant pend la flèche mortelle,
Elle fuit la douleur et l’emporte avec elle.

Tantôt ivre d’espoir la coquette Didon
Sur ses murs nouveaux-nés conduit son Céladon,