Page:Laveleye - Les Nibelungen.djvu/110

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que le sang lui jaillit des ongles. C’était une torture pour le héros. Pourtant il contraignit la noble vierge.

À changer l’indomptable volonté qu’elle avait eue d’abord. Le roi entendait tout, quoiqu’il ne dit mot. Siegfrid la pressa contre le lit à lui faire jeter de hauts cris. Par sa grande force il lui faisait terriblement mal.

Alors elle porta la main à son flanc pour saisir sa ceinture et l’en lier. Mais son bras vigoureux la repoussa avec tant de violence que ses membres craquèrent, ainsi que tout son corps. La lutte était finie : elle devint la femme de Gunther.

Elle dit : — « Noble roi, laisse-moi la vie. Pardonne ce que je t’ai fait. Jamais plus je ne me défendrai contre ton amour. J’ai trop éprouvé que tu sais dompter les femmes. »

Siegfrid laissa la dame couchée et se retira comme s’il voulait se dépouiller de son vêtement. Il lui prit du doigt un anneau d’or sans que la noble reine s’en aperçût.

Il lui enleva aussi sa ceinture faite d’un beau tissu tressé. J’ignore s’il le fit par orgueil. Il la donna à sa femme et depuis il lui en arriva malheur. Le roi et la belle vierge demeurèrent l’un près de l’autre.

Il la traita avec grande tendresse, d’une façon digne de tous deux. Elle dut renoncer à sa colère et à sa pudeur. Ses tendresses la firent légèrement pâlir. Hélas ! l’amour chassa sa grande force.

Et depuis lors elle ne fut pas plus forte qu’une autre femme. Il caressa avec amour ses charmes sans pareils. C’est en vain que Brunhilt eût essayé de résister encore. Voilà ce que Gunther avait obtenu par son affection.

Il resta ainsi rempli d’un tendre amour près de sa femme