Page:Laveleye - Les Nibelungen.djvu/162

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malheur ! Nous déplorerons toujours la mort de Siegfrid. » — « Vous le faites sans motif, dit la femme désolée ;

« Si vous aviez dû en avoir du regret, cela ne serait pas arrivé. Ah ! vous n’avez point pensé à moi, je puis bien le dire, puisque me voilà séparée à jamais de mon époux chéri. Hélas ! pourquoi le vrai Dieu n’a-t-il pas voulu que ce fut moi qui fût frappée. »

Ils maintinrent leurs mensonges. Kriemhilt s’écria : — « Que celui qui est innocent, le fasse voir clairement. Qu’il marche en présence de tous vers la civière : on connaîtra bientôt ainsi quelle est la vérité. »

Ce fut un grand prodige, et qui pourtant arrive souvent : dès que le meurtrier approcha du mort, le sang sortit de ses blessures. Voilà ce qui eut lieu, et on reconnut ainsi que Hagene avait commis le crime.

Les blessures saignèrent comme elles avaient fait étant fraîches. Les lamentations avaient été grandes ; elles le furent bien davantage. Le roi Gunther parla : — « Je veux que vous sachiez que des brigands ont assassiné Siegfrid. Ce n’est pas Hagene qui l’a fait. »

— « Ces brigands, répondit-elle, me sont trop bien connus. Maintenant, que la main du Dieu bon venge le crime. Oui, Gunther et Hagene, c’est vous qui l’avez commis. » Les guerriers de Siegfrid songeaient de nouveau au combat.

Une profonde douleur accablait Kriemhilt. Son angoisse devint plus grande encore, quand ses deux frères Gêrnôt et le jeune Gîselher vinrent se placer à côté du mort. Ils le plaignirent avec sincérité, et leurs yeux furent aveuglés par les larmes.

Ils pleurèrent, du fond du cœur, l’époux de Kriemhilt.