Page:Laveleye - Les Nibelungen.djvu/276

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s’il a un ami fidèle, celui-là le pleurera. Pourquoi ne reculez-vous pas devant nos chefs ? Vous devriez pourtant le faire, me paraît-il. On nous nomme tous des guerriers, mais nous ne sommes pas d’égal courage ! »

Tandis que le joueur de viole parlait ainsi avec colère, Hagene le très vaillant regarda derrière lui et dit : « Le valeureux ménestrel vous donne un bon conseil, héros de Kriemhilt, allez, retournez en vos logis.

« Je doute qu’aucun de vous exécute le projet que vous avez formé. Mais si vous voulez commencer, attendez jusqu’à demain au matin. Nous sommes étrangers, laissez-nous donc reposer cette nuit. Oui, je crois que jamais chevaliers ne l’auront fait aussi volontiers. »

On amena les étrangers dans une vaste salle, où l’on avait préparé pour tous les guerriers des lits très riches, larges et longs. Dame Kriemhilt méditait contre eux les plus funestes attentats.

On y voyait de superbes couvertures en étoffes éclatantes d’Aras et maints rideaux de lit en soie d’Arabie la plus belle qu’on pût voir, ornés de galons du plus brillant éclat.

Ces lits étaient garnis de fourrures d’hermine et de zibeline noire, qui devaient les couvrir durant le repos de la nuit, jusqu’au jour brillant. Jamais un roi ne fut si magnifiquement couché avec sa suite.

— « Malheur à notre logis de cette nuit, dit Gîselher, l’enfant ; malheur à nos amis qui nous ont accompagnés ! Quoique ma sœur nous ait invités si gracieusement, je crains qu’à cause d’elle nous ne soyons tous tués ! »

— « Quittez ces soucis, dit Hagene, la forte épée, je veux cette nuit faire moi-même la garde. Je pense que je saurai bien vous protéger jusqu’à ce que vienne le jour.