Page:Laveleye - Les Nibelungen.djvu/324

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« Et je leur aurais fait tout le mal que j’aurais pu, si je n’avais conduit ces guerriers ici. Oui, j’ai été leur guide au pays de mon maître. C’est pourquoi mon bras infortuné ne doit point les attaquer. »

Etzel, le grand roi, parla au margrave : — « Comment ! Est-ce ainsi que vous nous aidez, très noble Ruedigêr ? Nous avons déjà tant de morts en ce pays, que point n’était besoin d’en augmenter le nombre ! Vous avez très mal agi. »

L’illustre chevalier répondit : — « Il a insulté à mon courage. Il m’a reproché les honneurs et les biens que j’ai acceptés de vos mains ; aussi il en est arrivé malheur au menteur ! »

Voici venir la reine qui avait vu comment la colère du héros avait frappé le Hiune. Elle le plaignit lamentablement. Ses yeux se remplirent de larmes. Elle dit à Ruedigêr : — « Comment avons-nous mérité, le roi et moi,

« Que tu augmentes encore notre affliction ? Tu nous as toujours dit, noble Ruedigêr, que, pour nous, tu voulais tout exposer, ta vie et ton honneur ? J’entends tous les guerriers te placer bien au dessus des autres.

« Eh bien, je te rappelle l’hommage que ta main m’a juré, quand tu me conseillas, ô chevalier d’élite, d’épouser Etzel Tu me promis de me servir jusqu’à la mort de l’un de nous deux. Ah ! pauvre femme, jamais je ne me suis trouvée en semblable extrémité. »

— « C’est la vérité. Je vous jurai, noble femme, que pour vous j’exposerais et ma vie et mon honneur. Mais je n’ai point juré de perdre mon âme, et c’est moi qui amenai à votre fête ces princes de si illustre naissance. »

Elle reprit : — « Souviens-toi, Ruedigêr, de ta grande