Page:Lavergne, Jean Coste - 1908.djvu/13

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pourtant, depuis plus de six ans, les avait eus, à peu près tous, dans sa classe, et n’avait épargné ni ses soins, ni ses peines pour les instruire.

— Sont-ils ingrats tout de même !… pas un adieu ni un merci, de la curiosité seulement, — murmura l’adjoint, non sans un léger serrement de cœur.

II

Coste prit dans sa classe quelques livres et menus objets, en bourra sa serviette et enfila le couloir. D’un pas rapide, il traversa la cour de la mairie. Mais, une fois dans la rue, son empressement tomba. Certes, pour sa part, il était heureux de s’en aller. N’échappait-il pas ainsi à la quasi-servitude où l’avait tenu l’autorité tatillonne de M. Largue, avec lequel il n’avait jamais bien vécu ? Oui, mais sa femme, quel accueil allait-elle faire à l’annonce d’un départ immédiat ? En même temps, le regret ténu et presque inconscient de quitter cette ville, qu’il aimait et où il avait tant de relations et de bons amis, se levait au fond de lui, tandis qu’il arpentait ces rues souvent parcourues en tous sens et dont les moindres recoins lui étaient familiers.

Déjà, il voyait Louise tout en larmes, à l’idée qu’ils allaient abandonner cette chère ville où elle était née, cette patrie à laquelle son âme de grisette, ses habitudes peuple, ses amitiés d’enfance l’attachaient par mille liens insensibles, mais fortement résistants.

À cette pensée, une légère tristesse plissa le front de Coste. Distraitement, il répondait aux saluts des bonnes gens qu’il rencontrait dans les rues égayées de soleil, mais presque