Aller au contenu

Page:Lavergne - Fleurs de France, 1924.djvu/133

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

certainement je l’ai beaucoup connu... de réputation. Je l’ai même vu quelquefois. C’était un bien galant homme. Il m’aimait fort, je crois.

– Serait-ce lui ? se demanda Sabine. Oh ! non. »

L’intendante s’approcha d’eux.

« Quoi ! dit-elle, votre partie en est encore là ! Ah çà ! mais vous êtes donc des joueurs bien réfléchis ? Ah ! c’est un beau jeu que le jeu d’échecs. C’est dommage qu’il soit si ennuyeux ! Mais, vrai, croyez-vous gagner, mon cousin ?

– Je l’espère, dit le marquis, mais j’ai un peu mal à la tête.

– Allez boire un verre d’eau et prendre un peu l’air, mon cher marquis, dit l’intendante. Je tiendrai compagnie à Sabine. »

Le marquis salua et sortit du salon sans marcher tout à fait droit. Sabine le suivit des yeux d’un air étonné.

« Comment trouvez-vous mon cousin, Mademoiselle ? dit l’intendante.

– Grand causeur et bon convive, Madame. »

L’intendante se mordit les lèvres.

Le marquis a passé sa vie à la cour, Mademoiselle, et ses manières peuvent vous étonner, quoiqu’elles soient celles de la meilleure compagnie ; mais elles n’ôtent rien à ses bonnes qualités. C’est un charmant garçon, et qui désire passionnément obtenir l’honneur de vos bonnes grâces.

– Hélas ! Madame, dit Sabine, à quoi lui serviraient-elles ?

– Quelle Agnès ! s’écria l’intendante à demi-voix ; mais ne voyez-vous pas qu’il veut vous épouser ? Heureuse fille, vous n’avez qu’un mot à dire, et vous devenez marquise de Malignac ; vous aurez château, forêts, prés et ferme dans le plus joli pays du monde, près de Gaillac. Vous irez à la cour, vous roulerez carrosse : qu’en dites-vous ? Mais voici le marquis ; je le laisse continuer sa partie. »

Elle se leva et alla tracasser les Gottlieb, tandis que le marquis, reprenant sa place, essaya de renouer la conversation.

Sabine, très émue, réfléchissait à ce qu’elle devait faire, tandis que le marquis, jouant à tort et à travers, lui débi-