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IX

LES RUINES


Dès que le jour parut, Alain disposa avec soin un petit chariot qui appartenait à la cure ; il y étendit un tapis pris à l’église, attela un mulet, et pria Mlle de Brix de monter dans cette rustique voiture.

« Je vais vous conduire au Val, lui dit-il ; les révérends pères garderont notre bon seigneur dans la crypte jusqu’au moment où nous pourrons lui faire des funérailles convenables. Partons, Mademoiselle, vous n’avez que faire ici, et on y est trop près du château. »

Luce le regardait sans avoir l’air de comprendre. Il lui prit doucement la main, la fit lever, et l’emmena vers la porte. Elle se laissait conduire passivement.

« Je ne sais ce qu’a notre demoiselle, dit Marie, de toute la nuit elle n’a pas prononcé une parole. »

Ils arrivaient sur le seuil. Alain souleva Luce dans ses bras et la porta sur le chariot. Elle regarda autour d’elle en pressant son front de ses mains comme une personne qui s’éveille.

« Où allons-nous ? dit-elle.

– Au Val, Mademoiselle, dit Marie.

– Au Val ! s’écria Luce. Ah ! que je suis contente ! » et elle se mit à rire et à chanter. Elle était folle.

À peine arrivée au bas de la colline sur laquelle s’élève le village de Brix, la petite escorte de Luce rencontra Mme du Hommet, qui, ayant été avertie de grand matin par Pierre, accourait à Brix avec quelques domestiques bien armés. Alain lui apprit les funestes évènements de la nuit précédente, et la noble dame, mettant pied à terre, s’approcha de la fiancée de son fils, l’embrassa tendrement et