Page:Lavignac - Le Voyage artistique à Bayreuth, éd7.djvu/161

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mière ; c’est lui, ce neveu perfide qui lui amena la beauté merveilleuse que, dans son adoration, le généreux roi a respectée comme l’eût fait un père ; c’est lui encore qui, après avoir rendu, par la possession de ce trésor, son cœur plus sensible à la douleur, vient lui faire cette cuisante blessure, et verse en son âme le cruel poison du doute envers ce qu’il aimait le plus au monde. Pourquoi l’avoir précipité dans cet enfer dont rien ne pourra l’arracher désormais ? Tristan, qui a écouté les reproches du noble prince avec une tristesse croissante, lève sur lui un regard plein de pitié ; son secret, il ne peut le dire ; nul ne le saura jamais. Se tournant ensuite vers Iseult, qui le contemple avec des yeux suppliants, il lui annonce son départ pour la sombre contrée où sa mère autrefois l’enfanta dans la douleur et la mort. C’est là qu’il offre un asile à la bien-aimée, si elle veut le suivre dans sa triste retraite. Iseult lui répond que rien ne l’empêchera de s’attacher à ses pas, il n’a qu’à lui montrer la route ; son amant la baise doucement au front ; mais alors Mélot, bondissant de rage, tire son épée et provoque Tristan, qui se met vivement en garde. Leurs armes se croisent, et Tristan s’affaisse, blessé par son adversaire. Il tombe dans les bras de Kurwenal, tandis quTseult, éplorée, se précipite sur son sein.

3me  Acte.

Scène i. — La scène représente les jardins incultes et désolés du vieux manoir de Tristan, Karéol, situé en Bretagne, sur une hauteur au bord de la mer. Au loin, on aperçoit la ligne d’horizon par-dessus les murs à moitié en ruine et envahis par la végétation. Au fond, une porte de château féodal avec des meurtrières. Au milieu de la scène, à l’ombre d’un grand tilleul, la litière sur laquelle repose Tristan.