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Page:Lavignac - Les Gaietés du Conservatoire.djvu/120

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LES GAIETÉS DU CONSERVATOIRE



Il n’est aucun de vous qui n’ait déjà été ou ne soit prochainement victime de cette maîtresse de maison, femme du monde et protectrice des jeunes artistes, qui vous invite traîtreusement à dîner sans cérémonie, avec l’idée bien arrêtée qu’ensuite vous ne pourrez pas vous refuser à faire un peu de musique, à chanter ou à réciter des vers devant une cinquantaine d’amis qu’elle a invités à prendre le thé. Vous ayant donné à manger, elle trouve tout naturel de vous faire payer votre écot.

C’est une petite exploitation de l’artiste, très répandue et très économique.

Cet abus, vous y êtes exposés, sachez-le bien, pendant toute la première moitié de votre carrière, après que vous aurez quitté le Conservatoire. Il faut avoir acquis une véritable notoriété artistique pour pouvoir s’en considérer comme à peu près exempt.

Je veux seulement ici vous indiquer sommairement comment quelques-uns de vos illustres devanciers (car je ne doute pas que vous deveniez tous de grands artistes), ont parfois réussi à se soustraire à cette pratique indélicate.


Un jour, Vieuxtemps, le célèbre violoniste, reçoit un joli petit billet rose, parfumé :

Cher Maître,

Qu’il y a donc longtemps que je n’ai eu le plaisir de vous voir !

Faites-nous donc l’amitié de venir dîner vendredi avec nous, dans la