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Page:Lavignac - Les Gaietés du Conservatoire.djvu/121

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LES GAIETÉS DU CONSERVATOIRE

plus stricte intimité ; nous serons si heureux, mon mari et moi, de causer avec vous de vos récents triomphes !…

Donc, c’est entendu, à vendredi 7 h., nous comptons sur vous.

Votre fervente admiratrice.

Duchesse de ***

P.-S. — Surtout, n’oubliez pas d’apporter votre violon.


Vieuxtemps flaire le coup ; il le connaissait. Il prend sa plume et répond :

Madame la Duchesse,

J’aurai le vif regret de ne pouvoir me rendre vendredi à votre aimable invitation, ayant un engagement antérieur.

Mais, je vous enverrai mon violon.

Veuillez agréer, etc…


Et, en effet, il envoya son violon.


En une circonstance semblable, Chopin, lui, s’était laissé prendre au piège. Il avait déjà dîné, donc touché et en partie digéré son salaire, quand l’invite lui fut faite de se mettre au piano. Que faire ?

Il commence par plaquer quelques accords abominablement faux.

— « Mais ce piano ne marche pas, il faut au moins que je l’arrange ! » et il se met à démantibuler l’instrument, il en retire le clavier, qu’il pose par terre, il en retire la mécanique, qu’il couche sur un canapé, il en retire le pupitre, qu’il adosse le long d’un mur, et enfin il se retire lui-même, à la grande consternation de la maîtresse de la maison, affirmant qu’on ne peut pas jouer sur un piano dans cet état-là !!!


J’ai vu Schulhoff se tirer d’affaire de façon encore plus délibérée, et pourtant c’était dans une maison où tous les