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Page:Lavignac - Les Gaietés du Conservatoire.djvu/31

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LES GAIETÉS DU CONSERVATOIRE

Gounod rencontre Auber et lui demande ce qu’il pense de la santé d’Ambroise Thomas, qu’il a rencontré récemment, et qui lui a paru changé.

— « Thomas ! dit Auber, il est né changé ! »

Chose au moins singulière, Ambroise Thomas, qui, lui, n’avait certes pas l’habitude de faire des mots, a donné à celui-ci, soit qu’il en ait eu connaissance, soit par un hasard bien bizarre, le pendant le plus inattendu, et d’une galanterie singulière.

Un jour qu’il cheminait pensif, plongé dans sa perpétuelle rêverie, et regardant le trottoir à trois mètres en avant, il s’entend interpeller par une dame qu’il avait fort bien connue, mais dans un temps déjà ancien.

— « Comment, cher Maître, vous ne me reconnaissez pas, je suis madame X… ?

— Mais comment aurais-je pu vous reconnaître, chère madame ? Depuis que je ne vous ai vue, vous n’avez pas du tout changé ! »


Depuis la suppression du Gymnase Musical Militaire (1856) jusqu’en 1870, il a existé au Conservatoire des classes de Saxophone, de Saxhorn, de Solfège et d’Harmonie à l’usage exclusif des élèves militaires, des chefs et des sous-chefs, classes auxquelles s’intéressait d’une façon toute particulière le général Mellinet, commandant de la Garde Impériale, qui était, on le sait, un grand mélomane.

Soit qu’Auber lui abandonnât la présidence du jury, soit simplement en raison du prestige qui s’attachait à sa haute personnalité, le général Mellinet avait une grande influence dans les concours spéciaux de ces classes militaires, influence qui se manifestait par une propension bienveillante et parfois excessive à donner le plus de récompenses possible à des