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HISTOIRE DE LA MUSIQUE.

C’était peu, en apparence, que d’inventer et de préconiser un simple procédé mnémonique ; mais en formulant cette unique règle « que toutes les notes placées sur la même ligne doivent avoir le même sens », il avait posé la loi primordiale de la lecture musicale, il avait remplacé la routine par la méthode, rendu la musique accessible à tous. Tels sont les vrais services dont notre art est redevable à Guy d’Arezzo. Ils sont assez glorieux pour qu’il soit inutile de lui attribuer mille inventions dont il n’est pas l’auteur.

Nous n’avons parlé jusqu’ici que de la musique d’église ; il ne faudrait pas croire pourtant que les amateurs et dilettantes des premiers siècles du moyen âge n’aient eu pour toute distraction que les mélodies grégoriennes et quelques hymnes et antiennes. Héritière, après les invasions, de tout ce qui restait en Occident du trésor intellectuel des Grecs et des Romains, l’Église s’était emparée des lettres, des arts et de la musique, par conséquent ; aussi admettait-elle peu qu’il y eût des chants en dehors d’elle, et ses écrivains ne parlent de la musique profane que pour la flétrir ou la bannir. Mais, vivace comme tout ce qui vient du peuple, cette musique, léguée par les Romains ou apportée par les barbares de tous les coins du monde, n’en avait pas moins continué sa route lentement, sourdement presque, mais, en somme, sans interruption.

La chanson et la musique profanes (car toutes deux sont de même essence) paraissent avoir eu, du viie au xie siècle, deux origines. Ou ce sont des refrains latins, restés populaires en Gaule, ou bien les airs ont été importés par les envahisseurs barbares. La musique