(vicus Karonnorum). Ce roi ayant permis à de pauvres
ferrons (marchands de fers) d’occuper les places qui
régnaient le long des Charniers, la rue prit à cette occasion
le nom de la Ferronnerie. Un titre de l’abbaye
Saint-Antoine-des-Champs, de 1229, constate cette dénomination.
Ces ferrons bâtirent quelque temps après
des boutiques en bois. En 1474, Louis XI accorda ce
même emplacement aux marguilliers des Saints-Innocents,
et leur permit d’y faire construire plusieurs
petits bâtiments en bois, ayant la même largeur que
les auvents qu’ils devaient remplacer. À ces constructions
légères succédèrent bientôt de véritables maisons
qui obstruèrent tellement cette rue, que le roi Henri II
voulut y remédier par son édit du 14 mai 1554. La
négligence des prévôt des marchands et échevins causa
plus tard un grand malheur. Le vendredi 14 mai 1610,
à quatre heures après midi, le roi Henri IV se rendait
du Louvre à l’Arsenal, et passait par la rue de la Ferronnerie.
Un embarras de voitures ayant arrêté son
carrosse, ses valets de pied quittèrent la rue et passèrent
par une des galeries du charnier des Innocents.
Dans ce moment, le roi se penchait pour causer avec
le duc d’Épernon ; alors un homme s’avance, monte
sur les roues de la voiture, porte au roi, à l’endroit du
cœur, un coup de couteau qui lui arrache ces mots, les
derniers qu’il ait prononcés : « Je suis blessé ! » Sans
se déconcerter, l’assassin donne un second coup ; le
premier était mortel, le second ne l’était pas ; un troisième
est encore porté, mais le roi parvint à l’esquiver.
— « Chose surprenante (dit l’Estoile), nul des seigneurs
qui étaient dans le carrosse n’a vu frapper le roi, et
si ce monstre d’enfer eût jeté son couteau, on n’aurait
su à qui s’en prendre, mais il s’est tenu là pour
se faire voir et pour se glorifier du plus grand des
assassinats. » — Par une coïncidence bizarre, l’édit de
Henri II, qui prescrivait l’élargissement de la rue de la
Ferronnerie, avait été rendu le 14 mai 1554, et Henri IV
fut assassiné le 14 mai 1610. Cette perte cruelle ne servit
pourtant pas de leçon, et la rue ne fut élargie qu’en
1671, conformément à l’arrêt du conseil dont nous
transcrivons un extrait :
« Le roi ayant aucunement esgard aux requestes qui luy ont esté présentées par les doyens, chanoines et chappitre de Saint-Germain-l’Auxerrois, a ordonné et ordonne que suivant leurs offres, ils feront travailler incessamment à leurs dépens, à l’ouverture et eslargissement de la rue de la Ferronnerie en toute sa longueur, et à la construction des maisons qui termineront lad. rue du costé du cimetière des Saincts-Innocents, et pour cet effet, ordonne sad. Majesté, que lad. rue sera eslargie et conduitte en droitte alignement, depuis l’extrémité et encoignure de lad. rue de la Lingerie jusqu’à l’autre extrémité du costé de la rue Saint-Denis, à chacune desquelles extrémitez aura lad. rue trente pieds de largeur, et pour ce faire seront démolies les petites maisons, boutiques et échoppes qui sont en lad. rue de la Ferronnerie, adossées contre les murs du charnier dud. cimetière, etc…, et pour terminer lad. rue de la Ferronnerie, du costé dud. cimetière, sera faitte une fassade de bastiment de pierre de taille de douze corps de logis double, outre un demy qui sera à chaque bout, lesquels corps de logis seront de trente trois pieds de profondeur chacun hors d’œuvre par bas et outre ce auront trois pieds de saillie audedans dud. cimetière et au-dessus du charnier, desquels corps de logis la face du costé de la rue de la Ferronnerie sera accompagnée d’ornement d’architecture, conformément au plan et dessein qui sera paraphé, etc… Ordonne sad. majesté qu’au lieu des charniers qui sont présentement, en seront bastis d’autres au-dessous desd. corps de logis, etc. Fait au conseil d’État du roy, le 18e octobre 1669. Signé Pussort, Séguier, Colbert. »
Avant la révolution, près de l’endroit où l’assassinat de Henri IV fut commis, dans la rue Saint-Honoré, un propriétaire plaça sur sa maison, qui porte le no 3, le buste du Béarnais, au bas duquel il fit graver l’inscription suivante :
Henrici-Magni recreat presentia cives,
Quos illi æterno fœdere junxit amor.
Enlevée pendant la révolution, elle fut replacée vers 1816. — Une décision ministérielle du 28 messidor an V, signée Benezech, avait fixé à 12 m. la moindre largeur de la rue de la Ferronnerie. En vertu d’une ordonnance royale du 9 décembre 1838, cette moindre largeur est portée à 16 m. 60 c. Les maisons de 1 à 15 devront reculer de 4 m. 10 c. à 6 m. 60 c. ; celles nos 17, la maison à l’encoignure gauche de la rue Sainte-Opportune et les propriétés 27, 33 et 35 ne sont pas soumises à retranchement. Toutes les constructions du côté des numéros pairs, exécutées suivant l’arrêt du 18 octobre 1669, sont alignées. — Égout. — Conduite d’eau. — Éclairage au gaz (compe Anglaise).
Fers (rue aux).
Cette rue comptait déjà quelques habitations en 1250. Plusieurs opinions ont été avancées sur son étymologie. Jaillot prétend que son véritable nom est celui de rue au Fèvre, qu’on écrivait rue au Feure ; la consonne v ne se distinguait point alors de la voyelle u ; dans ce sens, le mot fèvre signifiait un artisan, un fabricant, en latin faber. Un autre savant, Saint-Victor, a pensé que le mot feurre signifiait paille. Nous croyons devoir adopter cette seconde opinion ; en voici le motif : Lorsque Philippe-Auguste eut terminé la construction des halles sur le territoire de Champeaux, ces nouveaux marchés centralisèrent de ce côté tout le commerce parisien. D’anciennes rues ou plutôt