Page:Lazare - L’Antisémitisme, 1894.djvu/115

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fond, et en tenant compte des changements opérés, la même situation que dans l’antiquité païenne. Par le seul fait qu’ils niaient la divinité du Christ, les Juifs se posaient en ennemis de l’ordre social, puisque cet ordre social était fondé sur le christianisme, de même que jadis, à Rome, ils avaient été, avec les chrétiens eux-mêmes, les ennemis d’un autre ordre social. Au milieu de l’écroulement du vieux monde, au milieu des transformations radicales qui s’étaient produites, ce peuple ubiquiste des Juifs n’avait pas varié ; il avait prétendu garder, comme toujours, ses mœurs, ses coutumes, ses habitudes et en même temps participer à tous les avantages que conféraient les états à leurs membres ou à leurs sujets. Or tous ces états, très hétérogènes aux débuts, s’homogénéisaient ; ils marchaient vers une unité de plus en plus grande ; ils aspiraient dès le moyen âge à cette centralisation à laquelle ils arrivèrent plus tard. Ils étaient donc amenés à combattre les éléments étrangers, étrangers nationalement et dogmatiquement, soit que ces éléments vinssent du dehors, comme les Arabes, soit qu’ils subsistassent au-dedans comme les Juifs. À ce moment de l’histoire le combat national et le combat confessionnel se confondent. Avec la barbarie persistante du régime féodal, ce combat ne pouvait être qu’atroce, d’autant plus qu’il était instinctif plutôt que rationnel, surtout de la part du peuple, car l’Église ou du moins la papauté et les synodes procédèrent par raisonnement. Étant donnés ces principes généraux, nous allons voir