possible de s’en débarrasser, car cet esprit juif avait inspiré ses premiers âges. Elle en était imprégnée comme les sables des plages sont imprégnés du sel marin qui surgit à leur surface, et bien que, dès le deuxième siècle, elle se fût appliquée à repousser ses origines, à écarter loin d’elle tout souvenir de son fondement initial, elle en avait gardé la marque. En cherchant à réaliser sa conception des états chrétiens dirigés et dominés par la papauté, l’Église tendit à réduire tous les éléments antichrétiens ; ainsi, elle inspira la réaction violente de l’Europe contre les Arabes et la lutte des nationalités européennes contre le mahométisme fut une lutte à la fois politique et religieuse.
Mais le danger musulman était un danger extérieur, et les dangers intérieurs qui menaçaient le dogme parurent tout aussi graves à l’Église. À mesure qu’elle devint toute-puissante, qu’elle atteignit son maximum de catholicité, elle supporta plus difficilement l’hérésie ; à partir du huitième siècle la législation contre les hérétiques s’aggrava. Jadis bénigne et se bornant à des peines canoniques, elle en appela désormais aux pouvoirs séculiers, et l’on sévit durement contre les Vaudois, les Albigeois, les Beghards, les Frères apôtres, les Lucifériens. L’inquisition que le pape Innocent III établit au treizième siècle fut le terme de ce mouvement. Désormais un tribunal spécial, ayant auprès de lui l’autorité civile soumise à ses décisions, fut le seul juge, juge impitoyable, de l’hérésie.
Les Juifs ne purent être laissés en dehors de