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LA CROIX DE SANG

d’une lueur aveuglante les cabanes d’écorce et le toit de la chapelle.

Ils virent une jeune fille se diriger vers la maison de la prière. Une foule bigarrée lui faisait escorte : des vieillards incapables de bêcher la terre des champs ; des femmes portant sur leur dos la nagane où dormait le nouveau-né ; des garçons jouant de la tambourine ; des vierges chantant des cantiques pieux.

Ils sourirent à cette vue, et leurs mains se crispèrent sur la gaine de leurs couteaux ou le manche de leurs casse-tête. Ils reprirent leur marche de fauves, mais ils se hâtaient maintenant. Le sang les attirait.

Déjà les Hurons étaient dispersés dans leurs petits champs, et, penchés sur des instruments nouveaux pour eux, les yeux fixés sur les sillons qu’ils ouvraient, ils rêvaient des moissons abondantes qui se berceraient à l’automne, comme de grandes vagues jaunes, sur cette terre aujourd’hui toute nue.