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FANTÔME

La première pièce se déroula lentement et descendit dans l’auge pleine d’eau.

— Au nouvel arrivé, au voyageur des « pays hauts, » l’honneur de commencer, proposa Pierre Beaulieu, le premier voisin.

Un murmure approbateur suivit.

Mathias Padrol alla prendre un des plus longs gourdins, et vint se placer auprès de l’auge. D’autres firent comme lui. Ils étaient six, trois d’un côté, trois de l’autre. Ils formaient la première « escouade. » D’un bras nerveux, avec leurs bâtons, ils poussèrent de-ci de-là, dans l’auge profonde, le tissu neuf qui s’imbiba d’eau chaude, et devint très lourd.

Ils chantèrent des « chansons à la rame, » des chansons aux refrains cadencés que toutes les voix répétaient, et leurs bâtons, en poussant l’étoffe, s’enfoncèrent dans l’eau comme des avirons. Quand ils les relevaient, des gouttes brûlantes ruisselaient comme des colliers de perles, avec un bruissement clair.