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FONTAINE VS. BOISVERT

series, » les gerbes d’avoine et de blé, superposées comme les pierres d’une muraille, laissant pendre, blonds et lourds, les épis encore pleins de soleil. Les fenils regorgeaient de foin, et, quand s’ouvraient les portes, le parfum de la fenaison emmagasinée sous les vastes toits blancs, s’échappait par bouffées enivrantes. La terre avait bien rendu ; le temps s’était comporté admirablement ; hommes et bêtes allaient festoyer tout l’hiver.

Moïse Fontaine était fait d’une bonne pâte. Comparé à sa femme, il paraissait un rayon de miel. C’est que Scholastique Bellefaçon ne se laissait pas marcher sur le pied, et ce n’était pas Moïse qui avait la garde des tables de la loi, au foyer conjugal.

Grande et sèche, elle cinglait comme une cravache. Au moral, sa langue emportait le morceau. Chose singulière, leur fille, Angélique, avait la douceur de l’agneau. Le mauvais exemple l’avait peut-être préservée. Souvent, en effet, devant une