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LE PÈLERIN DE SAINTE ANNE.

comme moi, du châtiment de ce garçon, vous n’en fassiez pas votre profit.

— Bah ! crois-tu qu’il est muet ? c’est une farce à sa façon, reprend le contre-maître qui ne croyait à rien.

— Une farce qui dure un peu longtemps ! riposte Picounoc, car il y a six mois jour pour jour que, coupant son dernier mot en deux, il n’en a laissé tomber que la moitié.

— Oui ! ajoute Lefendu, et depuis ce temps il a l’autre moitié sur le bout de langue : ça doit lui démanger.

Le vent et les flots hurlaient toujours pendant que les gens de cage badinaient ainsi. Les plançons échoués sur le sable, le long de la rive, étaient rudement secoués par les vagues, mais ne se déliaient pas encore. Le jeune muet, Djos, puisque ses amis l’appelaient ainsi, s’était éloigné des railleurs, et, passant de pièce en pièce, était venu jusqu’au rivage où, d’un bond, il s’élança.

Un peu plus bas que l’endroit où la cage s’est arrêtée, la forêt, sombre et pleine de senteurs, descend jusques au bord des eaux, et la verdure des bouleaux, des chênes ; et des