Page:LeMay - Le pèlerin de Sainte-Anne, Tome II, 1877.djvu/183

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Picounoc eut envie de faire une déclaration d’amour à Noémie. Dans nos veillées, si l’on rencontre une charmante villageoise qui ne semble pas indifférente, on manœuvre de manière à se trouver près d’elle : on dérive, on louvoie, on refoule le courant, on met la voile, on la replie, selon les circonstances et les lieux. On n’a pas soif, et l’on se lève pour aller boire au seau, près de la porte ; les rayons de la lune argentent les vitres de la fenêtre, et l’on va dehors pour s’assurer que le temps est clair et que les étoiles brillent au ciel ; le grand père arrive de l’écurie où tout est calme, et l’on va voir aux chevaux, de crainte qu’il ne se détachent, sortent de leurs parcs et se donnent des accolades du bout du pied ; et toujours l’on a le soin de ne pas trouver la chaise que l’on vient de quitter, mais d’en prendre une autre auprès de la personne recherchée. Et alors, en rougissant, on bégaie une excuse, on demande pardon à la jeune fille de ce que l’on ose prendre la place qu’un autre plus à son goût devrait occuper. Et la jeune fille qui se doute bien de quelque chose, ne se défend pas d’un léger mouvement d’orgueil. Elle pardonne de bon cœur… si déjà l’imprudente n’a pas fait quelque douce promesse.