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irenna la huronne

La Huronne est venue… Elle est venue enfin !
Le bonheur sera long. Des ivresses sans fin
Vont remplir désormais l’âme du fier sauvage.
La captive oubliera les lunes d’esclavage…

Le lac n’a plus de chants, le bois n’a plus d’échos ;
Tout dort, hormis les loups qui dévorent les os.
À travers les vieux troncs épars dans la nuit noire
Passe une forme svelte. Un long stylet d’ivoire,
Un stylet qu’elle agite et serre dans sa main,
Laisse tomber du sang le long de son chemin.
Elle court au hasard et comme une insensée.
Personne ne pourrait deviner sa pensée.
Elle va répétant, dans sa course, des mots
Oui tintent comme un glas aux voûtes de rameaux.

Devant la mort qui vient Ounis est impassible,
Mais il entend son nom et tremble… Est-il possible
Qu’un autre infortuné vive encor près de lui ?
C’est une ruse… Oui, là, dans l’ombre une arme a lui.
N’importe, il n’a point peur, il n’a que de la haine.
L’arme se trompe-t-elle ?… Elle coupe sa chaîne !…
Le malheureux captif reprend sa liberté.

Pour venger dignement sa race et sa fierté,
La vierge avait tué le chef impur et traître.