Page:LeMay - Les épis (poésie fugitives et petits poèmes), 1914.djvu/138

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
141
agar et ismaël

L’enfant est fatigué. Sur le cœur maternel
Il repose son front que dévore la fièvre.
Il a soif. La souffrance a fait pâlir sa lèvre,
Et sa bouche s’entr’ouvre ainsi qu’un lis. Agar
L’enveloppe longtemps d’un triste et doux regard,
Et son âme s’emplit d’une mortelle angoisse.
Un jour, au puits de Sur, un ange dit : Qu’il croisse,
Un peuple sortira de lui qui sera grand…
Et dès son premier âge, hélas ! la mort le prend,
S’écrie en sa douleur la mère stupéfaite.
.........................
— Sara la vieille épouse, Abraham le prophète
Pouvaient, dit-elle encor, le garder auprès d’eux,
Et me rejeter seule en ce désert hideux ;
Mais non, jusqu’à la lie il faut boire la coupe.

Comme un grand parasol un arbre se découpe ;
Il se découpe noir sur la molle blancheur
Du ciel de l’Orient. C’est l’ombre, la fraîcheur.
L’eau coule là peut-être… Oh ! s’ils pouvaient l’atteindre
Une goutte d’eau vive, et le feu va s’éteindre
Sur le front embrasé de l’enfant…
Sur ; le front embrasé de l’enfant…Au soleil,
Le désert brille plus qu’un océan vermeil,
Et les pieds des proscrits foulent des étincelles.