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les épis


Où donc est l’an dernier ? Simone, toute seule,
Par les champs en pacage et les ors de l’éteule,
Hier s’en est allée. Elle semblait souffrir.
Son âme, il se peut bien, ne voulait plus s’ouvrir.
Mais un nom descellait sa lèvre purpurine…
Près d’elle une génisse agita sa clarine,
Comme pour la distraire et lui dire bonjour.
Un oiseau, qui peut-être aussi souffrait d’amour,
Jetant un cri plaintif, l’effleura de son aile.
Elle sourit un peu, mais sa douce prunelle
Se mouilla.
Se mouillaSans souci des sentiers bien connus,
Qu’avaient foulés souvent ses alertes pieds nus,
Elle suivait les bords d’une limpide source.
Et la source, comme elle, en sa sauvage course,
Avant d’aller dormir dans le défrichement,
Faisait entendre alors un long gémissement.

Elle oubliait la braie et la filasse blonde,
Et son rêve suivait les méandres de l’onde,
Alors qu’elle entendit, au fond du ravin creux,
Des coups rythmés et drus, des voix de gens heureux.
Son pauvre cœur battit comme pour y répondre ;
Mais nul n’aurait pu voir sa tristesse se fondre,