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les épis

Du vigilant travail qu’exige la corvée.
On le sait, et la tâche à sa main réservée,
C’est d’attiser le feu sous le large échafaud,
De fournir à la braie un gerbillon bien chaud,
Et d’éviter aussi les soudaines « grillades ».
Elle sera prudente ; et les tendres œillades,
Les œillades de Jean, ce maître en trahison,
Ne la troubleront pas comme à l’autre saison.

Broyez, broyez le lin ! Il ne faut pas qu’on dorme.
Les instruments sont vieux, mais leur mâchoire est d’or
Ensemble ou tour à tour, près du ruisseau grondeur,
Broyez le lin neigeux, le chanvre dont l’odeur
Monte, comme un encens, jusques aux cimes chauves !
Ô le charme infini des rustiques alcôves,
De la fraîcheur des eaux, des souples coudriers !
Broyez, broyez le lin, ô jeunes ouvriers !
Bénie est la sueur que votre main essuie,
Et béni soit le rêve où votre espoir s’appuie !

Au sommet du coteau, le sable, peu à peu,
Scintillait au soleil comme un ourlet de feu.
Et tout en bas, dans l’ombre, auprès de l’eau, les aunes
Étoilaient le buisson de quelques feuilles jaunes.
Promenant au foyer son tisonnier de houx,
Simone, à demi-voix, disait un chant très doux :