Page:LeMay - Les gouttelettes, sonnets, 1904.djvu/124

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
122
SONNETS RUSTIQUES



LES COLONS


Entendez-vous chanter les bois où nous allons ?
Sur les pins droits et hauts comme des colonnades,
Les oiseaux amoureux donnent des sérénades,
Que troubleront, demain, les vigoureux colons.

Entendez-vous gémir les bois ? Dans ces vallons
Qui nous offraient, hier, leurs calmes promenades,
Les coups de hache, drus comme des canonnades,
Renversent bien des nids avec les arbres longs.

Mais dans les défrichés où tombent la lumière,
L’été fera mûrir, autour d’une chaumière,
Le blé de la famille et le foin du troupeau.

L’âme de la forêt fait place à l’âme humaine,
Et l’humble défricheur taille ici son domaine,
Comme dans une étoffe on taille un fier drapeau.{