Page:LeMay - Les gouttelettes, sonnets, 1904.djvu/141

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
139
SONNETS RUSTIQUES



LA FORÊT


Elle semble un grand lac aux immobiles eaux.
L’horizon bleu la borne, et nul ne sait son âge.
U y flotte parfois un vol lourd de nuage,
Et la voile qui s’ouvre est l’aile des oiseaux.

Elle a des pins altiers ; elle a d’humbles roseaux,
Des rayons de lumière où le papillon nage,
Des effluves grisants, des odeurs de carnage
Et de fauves sentiers où blanchissent des os.

Quelquefois, au-dessus de ses noires ramures,
Luisent des clochers blancs, admirables jalons
Que laisse sur sa route un peuple de colons.

Forêt, quand tu te plains, frissonnes ou murmures,
Quand tu grondes, gémis ou chantes, l’œil humain
Voit un clavier sublime où Dieu pose la main.