Aller au contenu

Page:LeMay - Petits poèmes, 1883.djvu/170

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
176
RÉMINISCENCES


Je te pleure toujours, toit bâti par mes pères,
Foyer religieux où tant d’amour sincères
Comblaient le cœur du troubadour !
Et toujours je te pleure, ô chambre solitaire,
D’où mon regard pensif sur le ciel et la terre
Flottait doucement tour à tour !

Je regardais souvent, dans les longs soirs d’automne,
Ces aspects merveilleux qu’un soleil couchant donne
Aux œuvres sublimes de Dieu.
Je regardais la nue avec sa longue frange
Flotter, comme un navire à la structure étrange,
Dans un vaste océan de feu.

Je regardais aussi jaunir nos pâturages ;
Je regardais nos bois, sans feuilles, sans ramages,
Partout s’endormir pour longtemps.
Mais l’arbre reverdit que le soleil caresse !
Et pour l’homme qui touche an seuil de la vieillesse
Il n’est plus jamais de printemps !

Cascades qui sonnez comme des cors de cuivre,
Vieux pins qui tout l’hiver vous drapez dans le givre
Comme, dans l’hermine, un grand roi,
Solitaires sentiers, bosquets pleins de mystères,
Fontaines qui courez sous les fraîches fougères,
Vous souvient-il encor de moi ?