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PICOUNOC LE MAUDIT.

puis se mirent au lit. La jeune ménagère veilla jusque vers les onze heures, ravaudant des bas en berçant, du pied, l’enfant mignon. Pendant qu’assise auprès de la table où brûlait une chandelle de suif, elle passait et repassait, dans les mailles usées, son aiguillée de laine, une tête curieuse se penchait vers la fenêtre, et la regardait avec des yeux de feu. On eut dit qu’un courant magnétique s’établit aussitôt entre la personne du dehors et Noémie, car celle-ci se retourna soudain vers la fenêtre ; mais la tête curieuse avait disparu déjà. Il est singulier que souvent nous sommes avertis par un messager merveilleux — est-ce le magnétisme ? — qu’un regard se fixe sur nous.

Noémie déposa son ouvrage et se mit à genoux près du berceau de son enfant pour faire sa prière du soir. La tête reparut dans la fenêtre, et l’on eut pu voir une singulière expression de trouble passer sur le visage de l’indiscret qui regardait ainsi. Un souvenir vint à sa mémoire : il se rappela une parole terrible, prononcée dans une horrible circonstance par son père — alors son compagnon de débauches — et cette parole, la voici : On va