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PICOUNOC LE MAUDIT.

pipe, et il sourit à l’idée du succès qui ne manquera pas de couronner son œuvre. Il se trouve habile et se félicite d’avoir été maudit de son père, car il attribue à la malédiction cette heureuse disposition au crime qu’il sent se réveiller en lui-même. Mais le crime qu’il aime, ce n’est point le crime vulgaire que tout homme mal-né peut commettre, et pour lequel tout imbécile se fait pendre ; c’est le forfait caché qui rapporte, à celui qui l’imagine, des biens ou des plaisirs, et qui reste un secret pour tous ; le forfait qui ne laisse jamais planer un soupçon sur son auteur, mais souvent le protège comme d’une égide.

Picounoc s’était donc mis à l’œuvre, et toutes ses paroles toutes ses démarches étaient calculées et tendaient à un même but. Le succès pouvait longtemps se faire attendre : mais quand on est jeune on peut espérer : et Picounoc était jeune encore. Il ne voulait pas risquer son jeu ; encore moins sa vie : c’est pourquoi il prenait le chemin le plus long ; c’était aussi le plus sûr.

Après avoir regardé, par la fenêtre, la fileuse qui chantait son triste refrain, il entra.