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au contraire n’a jamais fait parler de lui en mal ; ses mœurs sont irréprochables. Son nid, il le construit lui-même : il veille affectueusement à l’éclosion et à l’éducation de ses jeunes. Sa fidélité conjugale, ses vertus domestiques sont exemplaires ; le souffle de la calomnie oncques ne les ternit. La ponte se fait en mai, soit dans un vieux pommier, soit dans un cèdre : les œufs sont au nombre de quatre, quelquefois de cinq, d’un bleu foncé. La femelle affrontera les plus grands dangers plutôt que de quitter le nid ; si on la force de déguerpir, elle emploie les mêmes artifices que la perdrix et la bécasse pour détourner l’attention loin de sa chère couvée ; elle feindra d’être estropiée et se traînera en pirouettant.

La nourriture du Coucou se compose d’insectes, de fruits, de mollusques et autres objets qu’il trouve le long des ruisseaux où il aime à séjourner. Le mâle,

    sent leurs petits avec des insectes. C’est un fléau, dont l’atteinte toujours mortelle, semble choisir ses victimes parmi les plus intéressantes familles. Il immole chaque année des hécatombes de Fauvettes, de Rouges-Gorges, de Rossignols, de Bec-figues, etc. Un naturaliste anglais s’est livré à de profonds calculs de statistique pour savoir le chiffre des petits oiseaux que le Coucou détruisait bon an mal an dans les Îles Britanniques. Il est arrivé à un chiffre de deux à trois millions !

    Le Coucou est un des plus épouvantables emblèmes d’infamie que la nature a forgés. C’est un miroir de perversité omnimode qui reflète, avec une intensité étrange, les sept nuances de la gamme du vice, dite des sept péchés capitaux, Gourmandise, Paresse, Avarice, Luxure, etc., avec la soif du meurtre et l’ingratitude féroce par dessus le marché. Le jeune Coucou débute dans la vie par le crime ; ses yeux ne sont pas encore ouverts à la lumière du jour, que sa conscience est déjà chargée de cinq ou six infanticides.
    Si l’histoire du Coucou au berceau est un récit de forfaits monstrueux quasi contre nature, celle du Coucou adulte est une chronique scandaleuse et une inépuisable source de gais récits et de drames lugubres, où puisent également, à pleines mains, Boccace, Lafontaine, Frédéric Soulié, Eugène Sue. On y lit une satire sanglante des amours officielles et des traités de mariage où le roi a signé. — Toussenel.