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COULEUR DU TEMPS

Au bureau, elle n’avait pas sa lettre, Mademoiselle Lizette. Elle a poussé un soupir, et dehors, malgré elle, frappe du pied et se mord les lèvres pour ne pas pleurer. Puis, elle sent un serrement douloureux à ses tempes. En reprenant la grande route, elle est triste, mécontente. Une feuille qui tombe lui frôle les cheveux. C’est l’automne. Mademoiselle Lizette n’y avait pas pensé : elle y pense maintenant et trouve la route obscure, et regrette d’être isolée à la campagne. Les mêmes lumières se mirent dans le lac encore calme. Elles se suivent au bord du chemin comme sur l’eau, de distance en distance, sans jamais se toucher. Elles n’ont pas changé depuis tout à l’heure. Pourtant, Lizette ne les compare plus à des lanternes de fête…

Elle marche tête basse, préoccupée. Pourquoi n’est-elle pas venue, la lettre espérée ? Lizette sait de façon certaine qu’elle doit être en route depuis la veille. Et, puisqu’elle ne l’a pas eue ce soir, dans cette pauvre campagne, il faudra qu’elle attende toute la longue journée du lendemain avant l’autre courrier.

Mademoiselle Lizette soupire encore. Elle voudrait goûter sa promenade au bord de l’eau, ne plus songer qu’elle est déçue. Elle ne le peut pas. Elle a un poids qui lui écrase le cœur. Sur le trottoir, les criquets et les crapauds sautent à