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COULEUR DU TEMPS

elles tremblent comme elles le feraient au frisson d’une faible brise…

Ce soir, je changerai l’eau dans laquelle elles puisent un reste de fraîcheur, je couperai soigneusement un peu du bout de leurs tiges, et elles seront encore vivaces.

Et voici déjà que c’est le soir, et l’après-midi que j’attendais est passé. Je retrouve mes fleurs, imperceptiblement un peu plus vieilles, car elles sont embellies sous le cercle lumineux de la lampe. La clarté les envoie se mirer sur la vitre d’un petit cadre qui les avoisine, et dans le cristal du vase, que la lumière traverse en rayonnant, les tiges vertes se découpent ; mes fleurs semblent fraîches et vigoureuses comme si elles étaient éternelles. Mais encore un peu de temps, et l’on verra au bout des pétales la chair se faner et jaunir ; et un peu de temps en plus, et mes marguerites seront mortes…

Ce sont toujours les mêmes histoires dans la vie qui se répètent ? Pourquoi mon esprit s’arrête-t-il à regarder des fleurs et à constater qu’elles sont éphémères ? Tant et tant de mortels avant moi firent de pareilles réflexions, tant de mortels ont trouvé beaux les derniers jours d’été, et jolies et touchantes par leur présage d’automne